Le livre

Ce que j’appelle oubli

Survêtement, tee-shirt, jeune homme, supermarché, soif, bière. À profusion. Vole-t-il la bière quand il la boit debout dans les rayons ? Et quand bien même. Il ne s’agit que de ça, d’une canette de bière. Il est encore à l’intérieur du magasin lorsque quatre vigiles approchent et l’encerclent. Il ne se dérobe pas, ne cherche pas à fuir, il les suit presque docilement. Pourquoi avoir peur plus que de raison ? L’uniforme mis à part, ils pourraient être lui, agressifs malgré tout quand ils l’emmènent, pourquoi là, pourquoi si loin, à l’écart, dans les réserves, les coulisses, au fond. L’interpellation cède au lynchage. Ils sont quatre, aveuglés par leur propre violence, électrisés d’eux-mêmes. Il est seul. On ne doit pas mourir pour si peu. Pas comme ça. Juste le temps de dérouler le fil d’une vie, de se souvenir, de ne pas y croire.

L'extrait

"Et ton frère bientôt n'a pas la force de crier et d'essayer de fuir, il se raccroche à une idée, ils vont bientôt arrêter, tant qu'il peut penser il se dit, ils vont bientôt arrêter, ils vont bientôt arrêter ça et il a peur pour ses avant-bras parce que c'est avec eux qu'il peut protéger son visage, mais les coups tombent et bientôt ses bras tombent aussi, l'abandonnent, il n'a plus de force."

L’éditeur

Les Editions de Minuit

7, rue Bernard-Palissy - 75006 Paris www.leseditionsdeminuit.fr

L'auteur

Laurent Mauvignier

Laurent Mauvignier est né à Tours en 1967. Il est diplômé des Beaux-Arts en Arts Plastiques en 1991 et publie son premier roman aux éditions de Minuit en 1999. Ses livres ont été couronnés de plusieurs prix de lecteurs et de libraires, certains d'entre eux ont fait l'objet d'un spectacle, comme c'est le cas pour Ce que j'appelle oubli, adapté par le chorégraphe Angelin Preljocaj.